En lisant l'appel de la forêt
(je ne parle pas du livre de Jack London
mais du dernier article de La Ruche des Quilteuses)
m'est revenu en mémoire le livre que Marmotton m'a offert pour Noël.
Si vous êtes, comme moi, sensible à la beauté d'une forêt et curieux(ses) de comprendre ce qui nous attire en ces lieux et nous apporte tant de bien-être, « Être un chêne » vous apportera des réponses et complète l'article de Katell.
Il se lit comme un roman alors que c'est un ouvrage que je qualifierai de scientifique mais très pédagogique.
Ingénieur forestier à l'ONF (Office national des forêts), Laurent Tillon nous fait découvrir non seulement la vie d'un arbre et de la forêt mais surtout tout ce que nous ne voyons pas et n'imaginons même pas.
Nous découvrons la sensibilité du vivant.
Laurent Tillon présente son livre.
Sous-titré « Sous l'écorce d'un chêne », nous pénétrons véritablement à l'intérieur de cet arbre et du milieu auquel il est relié.
Nous comprenons vite les interactions insoupçonnées de tous les éléments : du champignon invisible au majestueux cerf, en passant par le mulot, la chenille, le capricorne ou encore le pic et tant d'autres...
De la plus petite radicelle enfouie sous terre jusqu'à la dernière feuille tout en haut du houppier il est difficile d'imaginer la circulation des informations nécessaires à la vie d'un arbre.
J'ai été impressionnée d'apprendre comment ces géants qui semblent immobiles communiquent entre eux, comment ils s'adaptent aux diverses situations qu'elles soient d'origine biologique, climatique ou humaine.
Nous suivons le développement de Quercus, le chêne, de sa naissance, il y a 240 ans jusqu'à nos jours alors qu'il n'en est qu'aux 2/3 de sa vie théorique.
Le développement du petit gland a été conditionné par bien des facteurs et continue à subir les aléas de son environnement.
Pour répondre à l'attaque de Tortrix, la chenille ou à la prolifération d'Apodemus, le mulot, Quercus est capable de différer l'éclosion de ses bourgeons tout comme les populations de ces petits rongeurs vont elles-mêmes se réguler en fonction de la nourriture.
Nous découvrons comment Dryocopus, le pic noir, ou Dendrocopos, le pic épeiche, en creusant leur loge dans le tronc de Quercus l'aideront à se protéger de Cerambyx, le capricorne en favorisant l'installation d'autres espèces comme la chouette ou la martre.
Du sous-sol à la canopée la coopération est partout.
Silva, la forêt qui abrite notre chêne, en l’occurrence celle de Rambouillet, a bien changé en deux siècles. Elle est passée de forêt royale uniquement destinée à la chasse et entretenue par les paysans qui soldaient ainsi leurs impôts à la forêt que nous connaissons où les citadins aiment se ressourcer.
Entre temps, son aspect a évolué en fonction des besoins humains et des aléas climatiques.
Si, après la Révolution, Silva est devenue réserve de bois de chauffage, au XXe siècle il a fallu la remplacer par des plantations de pins pour subvenir aux besoins de la mise en place du réseau téléphonique.
Silva perdait alors son statut d'écosystème naturel.
Le public prend trop souvent les plantations d’arbres pour de véritables forêts : en France, par exemple, on parle de la « forêt des Landes de Gascogne », alors que c’est une plantation de pins. Dans les deux cas, il s’agit d’arbres côte à côte, mais cela ne justifie pas de les confondre. Il est temps que cesse cette confusion entre deux ensembles d’arbres que tout sépare et qui s’opposent l’un à l’autre, car, en réalité, les champs d’arbres sont l’inverse des forêts.
Peu à peu, ce sont les aléas climatiques de plus en plus nombreux qui feront prendre conscience aux humains de la nécessité de préserver ce milieu en particulier après les tempêtes Lothar et Martin fin décembre 1999.
... la forêt est devenue un refuge pour l'ensemble de la biodiversité, tant pour les espèces fuyant l'artificialisation des paysages que pour les espèces de milieux agricoles qui ne trouvent plus suffisamment d'espaces où vivre sereinement...
Désormais, les forestiers doivent faire face à un compromis : produire du bois localement pour satisfaire la demande croissante de chauffage tout en proposant une forêt accueillante pour Homo qui aime s'y promener et en préservant la biodiversité de Silva.
Eux, immobiles, évoluent avec leur environnement et chaque espèce s'adapte à chaque situation, à chaque agression. Certains individus disparaissent parfois, mais globalement ils résistent, poursuivent leur vie et participent à l'histoire. La mort est naturelle, elle fait partie du cycle.
Si Silva a démontré, à de nombreuses reprises, sa faculté de résilience après les attaques d'insectes, les sécheresses, les incendies ou les tempêtes, résistera-t-elle encore longtemps au changement climatique ?
Homo aura-t-il l'intelligence nécessaire
pour limiter en amont les émissions de gaz à effets de serre ?
Homo acceptera-t-il le retour de Canis, le loup,
ce grand prédateur indispensable à l'équilibre de la biodiversité?
Si nous voulons encore longtemps bénéficier des bienfaits des arbres, continuons à observer la nature qui nous entoure mais apprenons à la comprendre et surtout réfléchissons aux relations entre les espèces, y compris celle d'Homo.
Prenons exemple sur Quercus
qui cultive sans le savoir l'art du Vivre-Ensemble.
... il nous faudrait peut-être accepter la différence et vivre pleinement avec nos congénères d'une part, mais aussi être plus attentifs et respectueux des autres espèces, de la nature, de chaque représentant de la Terre dont nous dépendons tant.